Le Club des Annonceurs : Adeline, vous êtes directrice de l’engagement d’entreprise et des marques chez Michelin, et puis vous avez un parcours qui est quand même assez atypique et intéressant. Agence de com, la distribution, les médias, l’industrie dans l’aérien, et encore l’industrie aujourd’hui. Dans un premier temps on va parler de tous les move. Vous êtes la best in class. D’abord des move de marché chez Michelin, ils sont déjà faits aussi bien géographiques avec le local que business avec l’hydrogène par exemple, pouvez-vous nous dire où vous en êtes aujourd’hui ?

Adeline Challon-Kemoun : d’abord sur le plan géographique effectivement ce sont des move assez anciens. Michelin a 130 ans. Né à Clermont-Ferrand il y a un peu plus de 130 ans aujourd’hui et s’est développé dans le monde entier dès le début du vingtième siècle, aux états-Unis dès 1908. Et puis il y a eu toutes les phases j’allais dire assez classiques des grands groupes français et internationaux. L’Asie dans les années 80 et puis depuis une quinzaine d’années l’Indonésie, la Malaisie et l’Inde qui sont des marchés à forte croissance. Ce qui est intéressant c’est que partout où est Michelin. Michelin est considéré comme une marque locale en général aux Etats-Unis en particulier les Américains sont convaincus que Michelin est une marque américaine. Il y a un petit jeu amusant qui est de regarder les films de Clint Eastwood en fait, beaucoup d’entre eux ont une scène qui se passe soit chez un revendeur Michelin ou avec une enseigne Michelin. Si vous prenez par exemple American Sniper, et bien à un moment donné le héros explique qu’il est beaucoup plus à l’aise pour ces GIs quand ils sont dans des MV équipés avec des pneus Michelin. Et effectivement Michelin fournit à peu près la moitié des pneus de l’armée américaine.

Le Club des Annonceurs : et puis il y a aussi ce move qui concerne le Business, l’hydrogène ?

Adeline Challon-Kemoun : il y a beaucoup de move business en fait. Michelin est à l’aube d’une nouvelle phase de conquête en termes de métiers. D’abord on associe Michelin au pneu. Mais il faut savoir que très longtemps Michelin a été une entreprise qui faisait des tas d’autres choses que des pneus. Premier guide gastronomique en 1900, toutes les bornes de signalisation autoroutières et routières dans les années 20. Michelin a fabriqué 2.000 avions bombardiers pendant la Première Guerre mondiale et ce sont les ingénieurs de Michelin qui ont conçu et fabriqué la 2CV. Donc Michelin n’a pas toujours fait que des pneus. Et même si bien sûr les pneus et en particulier les pneus de spécialités restent au cœur du modèle. Aujourd’hui Michelin est dans tous les matériaux bio, plastique, polymère, flexibles qui servent aussi bien pour réparer le corps humain que pour jointer des pipelines sous les océans et qui doivent résister à de fortes pressions, que dans la Mobilité Hydrogène. On est en train de construire aujourd’hui une usine en France. C’est assez rare pour être indiqué avec notre partenaire Faurecia avec qui nous sommes en joint venture pour fabriquer des piles à hydrogène. La première pile à hydrogène Michelin c’était il y a 15 ans. Vous voyez c’est un savoir-faire qui est déjà ancien dans l’entreprise et avec l’ambition d’être un acteur important de cette filière européenne de l’hydrogène et de fournir d’ici à 2030 environ 200 000 piles à hydrogène par an sorties de nos usines.

Le Club des Annonceurs : Impressionnant. Si on regarde maintenant le monde de l’entreprise vous êtes finalement une entreprise à mission sans l’être sous le label de la loi Pacte. Comment développez-vous cet engagement ? Cet engagement finalement pour le bien commun ?

Adeline Challon-Kemoun : Michelin a travaillé sur sa raison d’être en 2013. Et puis vous le savez sous l’impulsion notamment de Jean-Dominique Senard et avec Nicole Notat, il a participé à l’élaboration de cette partie de la loi Pacte. C’est très ancré chez Michelin historiquement et ça se manifeste par un engagement autour des trois P que nous ne sommes pas les seuls à revendiquer. Travailler autour du bénéfice des gens / people, de la planète et bien sûr surla performance économique ce qui n’est pas forcément très original. Ce qui l’est plus c’est la volonté de l’équilibre entre ces trois P et le fait d’accepter finalement les paradoxes et les injonctions contradictoires. Puisque pouvoir arbitrer entre ces trois P demande aux managers du groupe d’accepter les paradoxes, d’accepter encore une fois les injonctions contradictoires et de les résoudre pour leur équipe ce qui est un vrai défi au quotidien pour les équipes et pour les équipes RH.

Le Club des Annonceurs : Alors concrètement pour finir sur le move de communication. Il y a une très belle campagne que l’on a vu récemment, quelle est la génèse de cette campagn ? Comment lancer une campagne de cette ampleur dans la période actuelle ? C’est quand même assez surprenant. Et quels sont les retours sur cette campagne ?

Adeline Challon-Kemoun : alors c’est une campagne autour du mouvement. C’est une campagne qui célèbre le mouvement et la liberté de mouvement. Alors il est intéressant de dire que ça faisait dix ans que Michelin n’avait pas fait de campagne de marque mondiale, de campagne de marque globale. Et l’idée c’est de finalement de mettre en scène l’utilité de Michelin dans la vie des gens. On connaît Michelin d’abord pour les pneus de voiture, Michelin c’est bien plus que des pneus de voiture, des pneus d’avion, des pneus de génie civil, des pneus militaires et puis tous ces autres produits dont on a parlé. Et donc je rejoins ce qui a été dit tout à l’heure avec manifester aux yeux du consommateur notre utilité dans sa vie. Et puis le mouvement c’est une vraie conviction chez Michelin ça a à voir avec le progrès. Finalement on pense chez Michelin que le progrès humain se fait à partir de mouvements, de rencontres, d’aller se confronter. Et que à un moment où on s’interroge beaucoup sur nos mobilités et nos mouvements, et bien c’était important de réaffirmer que cela fait partie pour nous du progrès. Alors oui bien sûr quand la crise est arrivée on s’est interrogé, on aurait dû initialement lancer cette campagne au mois d’avril, donc on l’a évidemment décalée mais on a re-testé en fait puisque le mot de la fin on l’attend de nos clients et des consommateurs, et ils nous ont dit qu’en période de confinement et post période de confinement, et ça dans tous les pays où on l’a testé c’est à dire dans sept pays dans le monde, et bien c’était absolument j’allais dire nécessaire, utile. Et ça faisait beaucoup de bien finalement de reparler de ce mouvement qui est au cœur de nos vies et qui devrait l’être encore plus si on le pouvait aujourd’hui. `

Le Club des Annonceurs : Votre vision pour le futur par rapport à tout ce que vous faites aujourd’hui ?

Adeline Challon-Kemoun : notre vision c’est de faire ce mouvement entre la mobilité qui était notre territoire de ces quarante dernières années vers quelque chose qui va au delà de la mobilité. Quand je parle de tissus auto régénérants pour le corps humain ou quand je parle de pile à hydrogène on voit bien qu’on peut faire d’autre choses que de la mobilité donc on élargit finalement notre marque, sa perception et nos activités d’entreprise.

Le Club des Annonceurs : merci Adeline pour ce témoignage.

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